L’intelligence émotionnelle

Il ne se passe pas un jour sans que nous ne ressentions une émotion.

  • Que ce soit dans des situations minimes : la frustration à ne pas réussir à ouvrir un pot de confiture.
  • Ou dans des situations majeures : la tristesse dans une séparation affective.

Les émotions rythment notre quotidien et influencent nos décisions et actions.

Sans mode d’emploi pour les décrypter, nous risquons de les subir avec impuissance.

Il est normal de bien s’équiper pour une randonnée.

Mais de quels équipements avons-nous besoin pour vivre notre vie ?

Si je ne devais garder qu’une compétence.

Ce serait l’intelligence émotionnelle.

➖ Pour construire une vie qui me ressemble.

➖ Et faire face à l’adversité inhérente à la vie avec résilience.

Le mode d’emploi de nos émotions

L’émotion est comme un cheval sauvage.

Si nous le laissons contrôler, il risque de nous emmener dans une direction non souhaitée.

Alors que si nous comprenons son langage, nous pouvons l’apprivoiser pour avancer avec lui dans la direction désirée.

Nous ne choisissons pas forcément les émotions que nous vivons.

Car c’est un phénomène souvent automatique et rapide qui ne dépend pas de notre volonté.

Mais nous pouvons choisir la réponse à nos émotions.

Cela nécessite un mode d’emploi pour construire un espace de liberté entre nos émotions et la réponse qu’on leur donne.

Et ce mode d’emploi porte un nom : c’est l’intelligence émotionnelle.

L’intelligence émotionnelle est un ensemble de compétences qui nous aident à comprendre et composer avec un matériau bien particulier.

Le matériau émotionnel.

Ces compétences s’apprennent.

Vous découvrirez plus bas dans cet article les études scientifiques qui le démontrent.

Vers une plus grande flexibilité psychologique

Cet espace de liberté intérieure s’appelle la flexibilité psychologique.

C’est la capacité de choisir le comportement le plus adéquat en fonction du contexte.

Quand on parle de contexte, il y a 2 versants à prendre en compte :

  • Le contexte interne (nos besoins, valeurs, préférences)
  • Le contexte externe (les particularités de la situation).

Ces compétences émotionnelles permettent de faire nos émotions des alliés.

Comment ?

En remettant l’émotion à une place consultative mais non décisionnelle.

Développer sa flexibilité psychologique, c’est entraîner les muscles suivants :

  • Choisir des comportements éclairés par les informations émotionnelles plutôt que des comportements contrôlés par l’émotion (Gross, 2007).
  • Choisir en présence de l’émotion plutôt que d’y réagir automatiquement.
  • Limiter le pilote automatique qui nous oriente parfois dans des directions qui ne nous conviennent pas ou plus, afin de retrouver la capacité de dessiner notre plan de vol en conscience.

L’intelligence émotionnelle, ça s’apprend

Les études scientifiques indiquent que l’intelligence émotionnelle peut se développer.

Des études scientifiques indiquent que des ateliers de développement des compétences émotionnelles sont efficaces aussi bien auprès d’enfants (Durlak et al. 2011) que d’adultes (Kotsou & al, 2011).

C’est notamment permis par la plasticité cérébrale, la capacité du cerveau à réaliser de nouveaux apprentissages en modifiant son organisation neuronale et synaptique.

Le terme de compétences émotionnelles est désormais préféré à celui d’intelligence émotionnelle.

Pourquoi ?

Car le mot intelligence peut renvoyer l’impression que ce serait une sorte de talent inné et figé.

Or, les études nous disent tout le contraire.

Notre intelligence émotionnelle peut se développer, y compris à l’âge adulte.

Les 5 dimensions de l’intelligence émotionnelle

Moïra Mickolajczak est une chercheuse en psychologie spécialisée dans l’intelligence émotionnelle.

Elle identifie 5 compétences émotionnelles fondamentales.

les 5 compétences de l'intelligence émotionnelle

Ces 5 compétences se déclinent sur 2 domaines :

  • Mes propres émotions (intra-personnel) : savoir identifier, comprendre, exprimer, réguler et utiliser mes propres émotions.
  • Les émotions des autres (inter-personnel) : utiliser toutes ces compétences avec les autres. (exemple : aider l’autre à exprimer ses propres émotions)

Les 3 niveaux de l’intelligence émotionnelle

Pour Moïra Mickolajczak, il existe 3 niveaux de compétences.

les 3 niveaux de l'intelligence émotionnelle

Savoir intellectuellement (connaissance) ne signifie pas forcément savoir faire (capacité).

Et savoir faire ne transforme pas pour autant un comportement en habitude.

APPLICATION

Savoir que la relaxation aide à gérer le stress est une connaissance intellectuelle.

Savoir se relaxer est une compétence.

Savoir me relaxer régulièrement quand j’en ai besoin est une habitude.

L’enseignement important est que les ateliers et les formations sur l’intelligence émotionnelle doivent cibler ces 3 niveaux.

Si les formations ne ciblent que le niveau du savoir intellectuel, cela ne fera pas beaucoup de différences pour les participants.

Bénéfices de l’intelligence émotionnelle

L’intelligence émotionnelle présente des bénéfices significatifs dans les 4 domaines de vie :

  • Santé mentale : ces compétences permettent de prendre soin de ses besoins psychologiques pour un meilleur équilibre personnel.

    Les études attestent d’une meilleure satisfaction de vie, moins d’anxiété, de dépression, de burn-out et de troubles psychologiques comme des addictions ou des troubles des conduites alimentaires.
  • Santé physique : une meilleure expression, compréhension et gestion des émotions et du stress contribuent à une meilleure santé physique.
  • Relations : exprimer ses besoins et comprendre ceux des autres permet de construire des relations plus épanouissantes et durables.
  • Professionnel et scolaire : performance et niveau de bien-être plus élevés

A quoi servent nos émotions ?

Le système émotionnel se veut fondamentalement utile et constructif pour l’individu.

Son objectif est de nous protéger et de permettre un meilleur ajustement au contexte en fonction des besoins psychologiques.

Nous pouvons identifier 3 fonctions principales de ce système.

1. Les émotions nous alertent

Les émotions (même désagréables) ont un rôle fondamentalement constructif et fonctionnel : elles visent à nous informer de l’état de satisfaction de nos besoins pour permettre un meilleur ajustement à l’environnement.

2. Les émotions nous aident à réagir

Le système émotionnel est un chef d’orchestre.

Il coordonne une réponse rapide et cohérente au niveau du corps, de la motivation et du mental.

  • Au niveau physique, le corps est préparé à l’action.
  • Au niveau motivationnel, une direction est privilégiée selon la nature de l’émotion (la colère peut favoriser l’agressivité ; la peur peut faciliter la fuite selon l’évaluation subjective de la menace ; la culpabilité peut faciliter un comportement de réparation…).
  • Au niveau mental : notre attention, notre manière d’interpréter les évènements et le style de souvenirs rappelés sont influencés par l’émotion vécue .

Par exemple, quand nous sommes tristes, nous avons tendance à nous rappeler davantage des moments difficiles.

3. Les émotions transmettent des messages

Les émotions sont exprimées de manière verbale et non-verbale.

Cela permet de transmettre aux autres la manière dont nous nous sentons pour leur permettre de s’ajuster.

  • Si nous exprimons de la joie, cela peut les inciter à reproduire le comportement à l’origine de cette émotion.
  • L’expression de colère a comme fonction de dissuader le comportement problématique que la personne vient d’émettre.
  • Et l’expression de peur sur notre visage permet d’alerter immédiatement les autres concernant un danger qu’ils n’auraient pas perçus.

Emotions et difficultés psychologiques

Les émotions sont aussi impliquées dans nombreuses difficultés (dépression, troubles anxieux…).

Comme tout système, il peut présenter des problèmes.

Une alarme qui se déclenche en cas d’incendie nous sauve la vie.

Une alarme qui se déclenche toute la journée sans raison apparente nous empêche de vivre.

Ainsi, lorsque le système émotionnel est très réactif, au point de générer beaucoup de « fausses alertes », les émotions peuvent devenir envahissantes et épuiser l’individu.

Ces difficultés sont souvent causées par l’utilisation de stratégies de régulation émotionnelles limitantes.

Qui vise à soulager à court-terme mais qui maintienne le problème dans la durée.

Exemple : dans le cas de la peur de parler en public.

L’évitement des situations sociales empêche la personne de développer ses compétences de prise de parole en public.

L’évitement maintient ainsi durablement cette peur.

Même les émotions désagréables sont utiles

Les émotions désagréables sont tout aussi utiles que les émotions agréables.

Car elles nous alertent lorsque nos besoins psychologiques sont menacés.

Si nous tuons le messager, nous évitons à très court terme un inconfort émotionnel.
MAIS… nous nous privons d’une information essentielle pour prendre soin activement de nos besoins.

Déconnecter l’alarme incendie n’éteint pas le feu.
Cela permet simplement d’être moins gêné par le bruit.

Cependant, si nous ressentons trop fréquemment des émotions désagréables :

La diversité de notre répertoire de réactions a tendance à diminuer.

Nous réagissons alors de manière plus stéréotypée.

Les émotions agréables facilitent la flexibilité

La chercheuse en psychologie positive, Barabara Fredrickson, a beaucoup étudié l’impact positif des émotions agréables.

Elle constate qu’à l’inverse, les émotions agréables ont tendance à ouvrir notre attention et notre comportement.

Permettant ainsi d’investir de l’énergie vers l’extérieur pour construire des ressources durables.

Quand nous sommes joyeux ou curieux :
➖ Nous nous ouvrons plus facilement
➖ Nous allons plus vers les autres
➖ Nous retrouvons un optimisme qui stimule notre motivation.

Ainsi, apprendre à cultiver nos émotions agréables est une compétence utile pour une meilleure flexibilité psychologique.

A condition qu’elle ne soit pas investie comme une stratégie d’évitement ou de suppression des émotions désagréables.

L’évitement consiste à cacher le douloureux sous le tapis sans le traiter pour ne pas le voir.

Approfondir l’intelligence émotionnelle

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Joran Farnier

Joran Farnier

Psychologue, enseignant, formateur

Passionné par la psychologie, j’ai fondé l’Institut de Psychologie Positive Appliquée pour faire le pont entre les recherches et la pratique de terrain.

Nous formons les professionnels de l'accompagnement pour leur permettre d'exercer avec plus de clarté, d'efficacité et de confort dans un métier complexe.



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7 commentaires sur “L’intelligence émotionnelle

  1. Merci Joran pour ton site et tous ces articles inspirants ! Je me permets de les partager sur ma page FB car c’est plus que jamais d’utilité publique actuellement !

    Cathy REMY

  2. Bonjour
    En tant que psychologue, on est souvent sollicité.e sur cette question de quotient émotionnel et, avec lui, sa mesure (la part belle aux hypersensibles plus ou moins auto proclamés…).
    Savez- vous si cette échelle existe véritablement à ce sujet ? (Comme la WISC/WAIS) ou peut on s’appuyer sur nos propres observations cliniques ?

    Merci beaucoup pour vos articles.
    Je me régale et ça apporte beaucoup

    Virginie

    1. Bonjour,

      Merci pour votre retour,
      Il existe en effet plusieurs échelles pour mesurer les compétences émotionnelles. J’utilise la PEC (Profile of Emotional Competence) de : Brasseur S, Grégoire J, Bourdu R & Mikolajczak M. 2013.
      Il en existe d’autres cependant.
      Après, comme vous le dites, ce qui semble véritablement intéressant au fond, c’est de savoir quelle fonction cela a pour le patient de demander à faire ce test et qu’est ce qu’il cherche à travers ce score.

      Bonne journée,

      1. Bonjour,
        Je tenais à vous remercier pour cette source d’information que vous nous livrez, et du temps que vous y consacrez !
        J’ai lu que vous utilisiez l’échelle PEC (Profile of Emotional Competence) de : Brasseur S, Grégoire J, Bourdu R & Mikolajczak M. 2013.
        Ne la connaissant pas, où pourrais-je trouver le modèle svp ?
        D’avance merci pour votre retour,
        Bien à vous. Nathalie

  3. Bonjour,
    Merci beaucoup pour cet article !
    Je suis étudiante en Master 2 sciences psychologiques à l’UMons en Belgique.
    Je vais réaliser une recherche sur les compétences émotionnelles chez des sapeurs-pompiers formés au peer-support (pairs aidants). J’envisage d’utiliser le questionnaire PEC et de faire un entretien semi-directif.
    Si cela vous intéresse, et que votre emploi du temps vous le permet, je serais ravie d’échanger à ce sujet.
    Bonne fin de journée.

  4. Un grand merci pour la présentation de cet ouvrage que je me suis empressé de me procurer. Précis, riche et pratique, il est devenu un outil précieux pour ma pratique professionnelle.

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