Interventions de psychologie positive centrées optimisme

Pratiques de Psychologie positive

Dans un article précédent, nous avons vu les stratégies de réattribution causale pour développer l’optimisme.

Je vous présente ici des outils plus spécifiques à la psychologie positive pour le travailler.

La projection dans un futur souhaité

La pratique du Meilleur Moi Possible consiste à demander à la personne d’écrire son futur souhaité et possible en se projetant d’ici 5 ou 10 ans dans les différents domaines de vie (professionnel, famille, amis, loisirs, projets…).

  • Il est ensuite possible de lui demander ce que cette description du futur dit des choses précieuses pour elle et de ses valeurs. Par exemple, si elle rêve de voyager, cela peut parler de l’importance de la liberté, de l’ouverture ou encore de la rencontre de l’autre.
  • Et puis de lui demander quels sont les plus petits pas possibles qu’elle entrevoit dès maintenant pour se rapprocher de son futur ou pour vivre les valeurs précieuses dès maintenant (ex : comment elle peut se connecter à ce sentiment de liberté dans les prochains jours sans pour autant se lancer tout de suite dans le tour du monde ?)

En imaginant toujours le pire, on prend moins le temps d’imaginer ce qui compte vraiment pour nous. Cette pratique lui permet d’utiliser son imagination pour se focaliser sur un futur désiré et non sur un futur négatif ou catastrophique qui prend beaucoup de place.

Cette pratique peut aussi se faire sur le passé ou le présent : relater les moments, situations et expériences dans lesquelles je me suis senti au top de moi-même.

Il est recommandé de réaliser cette pratique de manière expérientielle et moins intellectuelle. L’idée est de permettre à la personne de se connecter à ce qui la fait vibrer. Pour cela, proposer à la personne de se mettre dans un état de disponibilité et d’ouverture en lui proposant de fermer les yeux si elle est confortable avec cela et juste de laisser venir les images, les sensations, les émotions et les pensées qui pourraient apparaître pendant la pratique.

La destination future comme référence

Prendre la destination comme référence au changement plutôt que le problème à résoudre. Ce changement de paradigme nous vient de l’approche systémique centrée solution.

Leçon 1 : Accompagner la personne avec comme référence la destination désirée plutôt que la résolution du problème.

En effet, être focalisé sur le problème à résoudre est caractérisé par un mouvement d’évitement de ce qui est douloureux (je ne veux plus de conflits), alors qu’avoir une description précise de la destination désirée est caractérisée par un mouvement d’approche de ce qui est désirée (je veux de la complicité).

Cela produit des effets émotionnels et motivations bien différent.

La personne qui m’a formée à l’Approche Centrée Solution (Jean-Paul Durand) m’a partagé une métaphore très intéressante pour décrire la différence entre ces deux approches :

Votre avion vient d’atterrir et vous décidez de prendre un taxi.
Si vous lui dites « emmenez-moi loin de l’aéroport » : il s’agit d’un mouvement d’évitement, vous donnez une information sur ce que vous ne souhaitez plus. Mais il ne sait pas pour autant ce qui compte vraiment pour vous, si vous souhaitez aller à votre hôtel, à la plage, chez votre ami de longue date…
Si par contre, vous lui dites « emmenez-moi dans la meilleure pizzeria du coin », votre demande est centrée sur la destination qui compte pour vous, plutôt que sur le lieu que vous souhaitez éviter.

Pour vous donner un exemple concret : un couple vient pour régler des problèmes de conflits répétés.

Si on cible les conflits, on reste dans une approche de résolution de problème, alors que si on veut viser la destination (ce qui compte vraiment pour le couple), on va leur poser d’autres types de question  :

« Imaginons qu’à la fin de notre travail, les conflits ont disparu, qu’est-ce que vous aimeriez trouver à la place d’important pour vous ? »

Chaque personne du couple va avoir l’opportunité de préciser ce qui est précieux pour lui et qu’il aimerait trouver à la place des conflits. « Retrouver de la proximité, de la complicité, des moments légers, partager des activités ensemble… ».

Cette réorientation vers la destination va permettre d’avoir comme référence les valeurs du couple plutôt que le problème que le couple ne veut plus comme direction thérapeutique.

Et cela fera une différence énorme, car on va se focaliser sur ce qui les rapproche (en reparlant à chaque séance des moments de proximité, de partage etc…) plutôt que sur ce qui les éloigne (en reparlant à chaque séance des conflits, même si c’est de manière constructive).

Il ne s’agit pas de nier les conflits, il est utile de leur faire une place et de les contextualiser, mais ils vont surtout servir de languette rouge à tirer pour savoir ce que le couple veut à la place.

Un focus attentionnel élargi

Les patients souffrant d’anxiété ou de dépression ont tendance à se focaliser sur les évènements négatifs et catastrophiques. Les réalités positives sont souvent minimisées par notre cerveau, et les pratiques de psychologie positive visent à braquer nos projecteurs attentionnels sur ces réalités.

Il s’agit de proposer aux personnes de tenir un petit journal des petits moments agréables au cours d’une journée.

Pendant les séances, avec des patients souffrant de dépression, je leur demande tout d’abord comment ils vont, puis ensuite je leur demande quels ont été les petits moments agréables depuis la dernière séance. En leur laissant le temps de chercher, ils finissent par en trouver et cela permet d’induire des émotions agréables et surtout de repérer les valeurs cachées derrière ces moments (ce qu’il y a de précieux pour eux). Il ne faut pas avoir peur qu’ils n’en trouvent pas, car cela arrive rarement et quand c’est le cas, c’est l’occasion de les amener à provoquer ces moments.

Lorsque la personne est focalisée sur ce qui pourrait se passer de négatif ou de catastrophique : il est important d’accepter et de s’ouvrir à ce fonctionnement, en nommant que c’est utile d’avoir en tête ce qui est négatif pour s’y préparer. Cela permet à la personne de se sentir acceptée de manière inconditionnelle.

Et puis ensuite de faire la différence entre probabilité et possibilité, un crash d’avion est une possibilité, mais est très improbable. Cela peut être de demander à la personne avec humour et curiosité « si on devait faire un pari sportif de 100€ sur le scénario le plus probable, est ce que vous miseriez sur le crash d’avion ? ».

Puis de l’amener à focaliser son attention sur les autres scénarios, « Votre attention a tendance à se focaliser sur les risques les plus graves, cela vous va si nous prenons ensemble le temps d’imaginer qui pourrait se passer de bien à l’idée de partir en vacances ? » et de l’inviter à décrire tous les aspects agréables de son expérience pour lui permettre d’avoir conscience des réalités positives et des réalités négatives sans que ces dernières ne prennent toute la place.

Les émotions positives

Barbara Fredrickson a étudié les émotions positives pendant plus de 10 ans en laboratoire.

Leçon 2 : Les travaux de Barbara Fredrickson suggèrent que les émotions positives contribuent à générer un mouvement d’ouverture au contexte, aux autres et aux opportunités en générant des comportements nouveaux aidant ainsi à construire de nouvelles ressources et réussites.

A l’inverse, les émotions désagréables ont tendance à restreindre notre attention (centrée sur le problème) et notre comportement (avec des réactions plus automatiques : comme la fuite ou l’attaque…). Cela est utile face à une difficulté, mais lorsque les émotions désagréables deviennent dominantes, l’individu a beaucoup moins de flexibilité psychologique.

C’est pourquoi il est vraiment important de faire des émotions agréables un thème régulier de séance. Pas dans le but d’éviter de parler des émotions douloureuses, puisqu’on serait dans un évitement émotionnel, ce qui viendrait dire au patient “ces parties de vous ne sont pas OK”. Mais plutôt pour qu’elles aient également un droit de cité dans les séances, aux côtés des émotions douloureuses.

La psychologie positive a été très créative en termes de pratiques pour cultiver les émotions agréables (journal des moments agréables, pratiques de gratitude, partager ses émotions agréables aux autres pour bénéficier de la contagion émotionnelle, s’engager dans des activités sources d’émotions agréables…).


? Passez de la compréhension à l’intégration de ces outils avec les prochaines formations




Les forces et ressources

Leçon 3 : Explorer les forces, les ressources et les victoires passées permet d’aider le patient à repérer ce qui marche bien en lui plutôt qu’uniquement ce qui dysfonctionne.

Comme dans les thérapies nous nous focalisons sur les problèmes du patient (même si c’est de manière constructive), nous pouvons aussi lui donner le sentiment que les problèmes prennent toute la place.

En lui renvoyant une représentation positive de ses capacités, on nourrit le sentiment d’auto-efficacité utile pour l’optimisme.

Cela permet aussi d’aider le patient à repérer ses stratégies efficaces d’adaptation aux évènements difficiles afin de lui permettre de les mobiliser à nouveau lorsque cela est nécessaire.

Il est intéressant de demander au patient de lister les situations qu’il a eu le sentiment de mener à bien au cours de sa vie. Puis de lui demander ce qui lui a permis d’arriver à ce résultat-là : ce qui relève de ses actions, contributions et compétences.

Une fois que le patient nous a donné des mots clefs sur ses compétences comme « courage » ou « persévérance », on peut faire une « recherche google » dans le cerveau du patient en lui demandant s’il se rappelle d’autres situations où il a pu faire preuve de persévérance ou de courage. Cela va permettre de charger le mots clefs en situations, en émotions et d’amplifier la représentation positive du patient à partir d’expériences concrètes.

Les questions de résilience

L’approche centrée solution apporte des questions cliniques très riches pour explorer les ressources des patients. Nous venons de voir comment le faire du côté des réussites. Nous pouvons aussi le faire du côté des passages de vie difficiles autant passé que présent.

Leçon 4 : Les questions de résilience visent à renseigner le patient sur ces capacités de résilience et sur les ressources qu’il mobilise en tant de crise (même s’il n’en a pas toujours conscience).

La pratique consiste à reprendre les évènements difficiles passés surmontés et repérer comment la personne a fait pour avancer malgré tout, pour survivre, pour tenir. Comment a-t-elle réussi à s’adapter ou à tenir face à des contextes hostiles et douloureux ?

Pour cela, il est essentiel que le professionnel cultive sa curiosité et sa surprise pour ce que l’être humain est capable de traverser, d’encaisser et de surmonter. Cette surprise exprime au patient que cela ne va pas de soi de s’adapter à des évènements de vie douloureux.

Il est possible aussi de poser ces questions lors d’un évènement présent douloureux.

  • « Comment faites-vous pour tenir malgré tout ? »
  • « Quel a été le moment le plus douloureux dans ce que vous traversez ? Et comment avez-vous fait pour continuer d’avancer ? »

Ces questions permettent d’identifier les stratégies d’adaptation et les ressources que le patient a déjà utilisé par le passé, et qui sont potentiellement mobilisables dans le présent et le futur.

Il est parfois plus écologique et facile de partir de ce qui existe déjà de fonctionnel plutôt que de développer de nouvelles compétences.

L’auto-compassion

Leçon 5 : L’auto-compassion est la capacité à s’ouvrir à sa propre souffrance avec bienveillance et gentillesse plutôt qu’avec jugement et rejet.

Développer cette capacité va permettre au patient de s’ouvrir aux émotions difficiles qu’il peut chercher à fuir par le recours systématique à l’imagination des scénarios catastrophes.

Ces stratégies peuvent avoir comme fonction de contrôler le sentiment d’incertitude et d’éviter la déception en imaginant toujours le pire.

L’auto-compassion facilite deux apprentissages essentiels, particulièrement pour les patients qui souhaitent lâcher des défenses très coûteuses contre des émotions redoutées :

  • Une meilleur gestion de la déception : apprendre à pouvoir être déçu de soi sans se rejeter méchamment.
  • Une meilleure gestion de l’incertitude : apprendre à s’ouvrir sans lutte excessive face à ce qui arrive, à ce que la réalité nous propose, notamment dans des contextes d’incertitudes ou de déception. La confiance dans sa capacité d’accueillir les évènements indésirables permet de lâcher le contrôle rigide et impossible qui cherche à transformer l’incertitude de la vie en certitude rassurante. Le lieu du contrôle change : je ne peux pas empêcher à 100% des évènements indésirables d’arriver dans ma vie, mais je peux influencer la manière de les vivre.

L’auto-compassion est avant tout permise par le regard compassionnel du thérapeute. En découvrant que le regard bienveillant se maintient sur les aspects difficiles ou gênants de son expérience, il peut envisager une autre manière de rentrer en relation avec lui-même.

Prochain article de la newsletter : Les applications pratiques de la théorie de l’auto-détermination pour faciliter une motivation internalisée, une implication et un bien-être.

Ce qu'il y a de fabuleux avec la connaissance, l'amour et le bonheur, c'est qu'ils sont décuplés lorsqu'on les partage.

3 commentaires sur “Interventions de psychologie positive centrées optimisme

  1. Merci beaucoup !! Vos articles sont toujours très riches en idées, en concepts, en informations, un contenu au top qui élargit mon champ de vision et m’apporte toujours beaucoup … Merci !!

  2. Je vous remercie également pour ce panel de pratiques, partie théorique et exercices possibles qui me sera précieux pour mes prochains Ateliers de Psycho. positive (je ne savais pas trop comment travailler à partir des passages de vie difficiles.

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